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Italie - Assise, de Saint François à Giotto




Assise, haut-­lieu du christianisme en Europe, possède un patrimoine exceptionnel, qui lui a valu son inscription au patrimoine mondial par l’Unesco. Si la ville est la deuxième destination de pèlerinage en Italie après le Vatican, l’amateur d’art trouvera à Assise une immersion dans le XIIIème siècle fantastique ! Toute la ville médiévale mérite des promenades approfondies, au hasard des ruelles en pentes. Et puis bien entendu, on engouffrera dans la basilique Saint-François, pour prendre une grande leçon de peinture avec le maître Giotto, qui réalisa ici, dans les deux chapelles superposées, un de ses plus grands chefs-d'œuvre.

La somptueuse chapelle supérieure de la basilique St-François, apogée de l’oeuvre de Giotto. Une merveille !


Basilique Saint­-François


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1 - Vue sur Assise, perchée à 424 mètres d’altitude. Longue histoire que celle d’Assise, fondée par les Ombriens, occupée par les Etrusques puis par les Romains. De cette époque romaine la ville a d’ailleurs conservé quelques vestiges. Après encore de nombreuses péripéties, c’est véritablement le XIème siècle qui marquera le renouveau et l’apogée de la ville. Durant trois siècles, la ville s’agrandit, la renommée de St François, mais aussi de Ste Claire, dépasse de loin les limites du pays. Il faudra la peste noire pour mettre fin à cet état de grâce. Autre épisode marquant, récent celui­-là, le gros tremblement de terre de 1997 qui endommagea sérieusement la ville et fit s’effondrer une partie de la basilique. Il a fallu de nombreuses années de restauration minutieuse mais l’on peut de nouveau admirer les splendeurs de la ville.

2 - Nous voici donc devant la basilique, construite à partir de 1228 sur trois niveaux : une haute église supérieure, magnifique exemple de gothique italien, une église inférieure, plus basse, décorée de fresques d’artistes majeurs du Moyen-­Age comme Giotto, Cimabue son maître, Simone Martini ou Pietro Lorenzetti ; enfin, une crypte, où sont déposés les restes du Saint, lieu de pèlerinage d’une importance capitale. La première pierre fut posée par le pape Grégoire IX, au lendemain de la canonisation de Saint François, et son corps est apporté en catimini afin d’éviter les pillages.


Saint François – basilique basse 1 et 2


La basilique inférieure ressemble à une immense crypte à voûtes en ogives. Se reporter au plan ci après pour les chiffres renvoyant aux parties photographiées. 

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1 - 1 en entrant, on trouve face à soi la chapelle de Sainte-­Catherine d’Alexandrie, érigée en 1270. Toute la décoration évoquant des scènes de la vie de la Sainte remontent au XIVème siècle, par un artiste anonyme.

2 - 2 vue de la vaste basilique inférieure proprement dite, sombre, regorgeant de trésors picturaux. Elle se compose d’une unique nef avec arcs en pleins cintres flanquée de plusieurs chapelles. On y trouve les plus vieilles fresques de toute la basilique, signées « Maître de Saint­-François » : cinq scènes de la Passion du Christ sur le côté droit faisant face à cinq autres scènes de la vie de St François sur le côté opposé. De par cette disposition, les Franciscains ont clairement voulu faire de leur patron un second Christ. Les deux murs sont reliés par un plafond peint d’un bleu nuit constellé d’étoiles d’or. C’est somptueux. Malheureusement, la plupart de ces fresques initiales sont soit dans un très mauvais état de conservation, soit entièrement détruites lors de l’ouverture dès le XIVème siècle des chapelles attenantes, afin de permettre à de riches familles nobles de posséder un lieu de dévotion dans ce site à la réputation grandissante.

basilique basse – crypte

Depuis le milieu de la nef, un escalier à double révolution permet de descendre dans la crypte, lieu de sépulture de Saint-François, et découvert seulement au début du XIXème siècle ! Ses restes avaient été cachés pour prévenir les pillages et leur dispersion dans toute l’Europe du Moyen-­Age.

crypte


basilique basse – chapelle Saint-Martin 3

La chapelle Saint­-Martin fait partie de ces nombreux ajouts du XIVème siècle qui ont ravagé les fresques initiales. Celle-­ci fut commandée par le cardinal Gentile de Montefiore Partino. Elle est célèbre grâce à son magnifique cycle de fresques attribuées à Simone Martini entre 1313 et 1318, qui abandonna un temps sa Maesta de Sienne pour se consacrer à ce projet. L’ensemble des fresques relate des épisodes de la vie de Saint­ Martin, évêque de Tours.


Chapelle Saint-Martin

A - Saint Louis de France et Saint Louis de Toulouse
B - Sainte Claire et Sainte Elisabeth de Hongrie 
C - dédicace par le cardinal Gentile de Montefiore Partino 
D - funérailles de Saint Martin 
E - résurrection d’un des jeunes 

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1 - A – Saint­ Martin partageant son manteau avec un pauvre B – le rêve de Saint­ Ambroise C – apparition du Christ et des anges dans le songe de St­ Martin

2 - A – messe miraculeuse B – investiture de Saint ­Martin en tant que chevalier C – visite de l’Empereur D – renoncement aux armes de Saint­ Martin


basilique basse – chapelle Sainte Madeleine 4

Cette chapelle remonte également au début du XIVème siècle et fut décorée par des élèves, ainsi que par le maître lui­-même : Giotto. Les fresques prennent plusieurs formes : médaillons, personnages debout sous la voûte, scènes narratives sur les murs, portraits des donateurs.

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1 - A – Marie­ Madeleine converse avec les Anges B – Noli me tangere C – voyage de Marie Madeleine à Marseille

2 - A – la résurrection de Lazare


basilique basse – croisée 5

La voûte surmontant l’autel est un des chef-d'œuvres de Giotto. Très impressionnante, elle met en scène, autour du Christ de l’Apocalypse sur la clef de voûte, les allégories des trois vertus franciscaines (pauvreté, chasteté et obéissance) et, sur le quatrième voûtain, une gloire de Saint François, vu comme le sixième sceau de l’Apocalypse.

 


A ­ Christ du Jugement Dernier 
B ­ gloire de Saint ­François : François est intronisé au centre de la surface triangulaire, parmi un cortège se détachant sur un fond or. Il y a une atmosphère festive, avec anges jouant de la musique. Le corps du Saint rayonne de mille feux. 
C ­ allégorie de la chasteté : la chasteté est représentée enfermée dans un puissant château, uniquement accessible aux Anges. Trois franciscains ont grimpé la colline et seront préparés, lavés, habillés, par les Anges. Les Démons sont rejetés dans la partie basse à droite de la scène. 
D ­ allégorie de la pauvreté : la pauvreté, jeune fille en haillons à qui l’on lance des pierres, est mariée par le Christ à Saint François, devant une foule d’anges apportant des offrandes. Les riches s’accrochent, eux, à leurs sacs d’argent. C’est la première fois dans l’histoire de la peinture que l’on trouve représentées des allégories que l’on ne voyait qu’en littérature.
 E ­ allégorie de l’obéissance : l’Obéissance, placée entre la Prudence et l’Humilité, place son joug sur les épaules d’un jeune moine qui s’agenouille en face d’elle, tandis que François, debout sur le toit et entouré de deux Anges, porte également un joug. 


basilique basse – transepts N et S 6

Ensemble de fresques du transept sud, chef d’oeuvre du siennois Pietro Lorenzetti, de 1315 à 1330. Pas moins de six scènes de la Passion du Christ et une immense crucifixion.


Le transept nord a été pris en charge par Giotto et ses élèves. Montrant l’enfance du Christ, elle sont absolument révolutionnaires à leur époque, car c’est la première fois qu’un peintre montre un tel degré de réalisme en figurant des visages marqués par les émotions. Le maître italien progressera encore pour réaliser son chef d’oeuvre à Padoue, dans la chapelle de l’Arena.


A ­ la Visitation B ­ la Nativité C ­ l’adoration des Mages D ­ la présentation au Temple


A ­ la fuite en Egypte B ­ le Christ parmi les docteurs de la Loi C ­ le massacre des Innocents D ­ le retour du Christ à Jérusalem

en haut à gauchel’adoration des Mages en haut à droiteprésentation du Christ au Temple en bas à gauche  – la Crucifixion en bas à droite – l’immense Maesta de Cimabue (1278) est le seul vestige des anciennes fresques épargné par Giotto et ses élèves. La Vierge entourée d’Anges est représentée sur un trône en bois richement décoré, accompagnée de Saint-François qui se tient debout à droite. Il s’agit de la plus ancienne représentation de la Sainte. L’enfant Jésus tend la main pour saisir la robe de sa mère, qui lui caresse la jambe de ses longs doigts graciles. Les Anges rythment la scène en regardant les spectateurs tantôt de droite tantôt de gauche. Quant à Saint François, pieds nus, il montre ses stigmates sur les mains qui tiennent un livre. 



Saint­-François – couvent de Saint­-François


L'imposant couvent composant l’extrémité occidentale de la ville possède d’immenses contreforts le faisant ressembler à une forteresse. Dès le départ furent pensés un dortoir, un réfectoire, une salle capitulaire, une salle papale et un scriptorium. Durant les XIIIème et XIVème siècles, la bibliothèque du couvent de Saint ­François rivalisait d’ailleurs avec la prestigieuse Sorbonne. Au XVème siècle, les papes en firent leur lieu de résidence d’été, avant que les bâtiments ne soient transformés en hospice deux siècles plus tard, afin de soigner et venir en aide aux nombreux pèlerins.

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1 - cour du couvent

2 - en route pour la basilique supérieure…


Mais qui était ce fameux Saint François ? Nous voici arrivés à mi-parcours, entre basilique inférieure et supérieure, au niveau du couvent. Quel monument consacré à ce Saint François ! Revenons quelques instants sur ce personnage si important, figure parmi les plus vénérées de tout le monde catholique. Fils de riches marchands de tissus, il a connu une enfance aisée, qui prit fin en 1204 lors d’une vision qui lui fit perdre le goût de la vie mondaine. Il se joint même à un groupe de pauvres rejoignant la basilique Saint-Pierre, au Vatican, pour un pèlerinage de mendicité. Dès lors, il se tournera définitivement vers une vie d’ascèse. Il commence à réunir des fidèles, et son ordre, les franciscains, sera autorisé par le pape Innocent III, qui le voit en rêve soutenant la basilique Saint-Jean du Latran en ruines. Première personne connue à avoir supporté les stigmates du Christ en 1224, il est aussi le saint patron des animaux, que l’on voit souvent représentés dans les fresques.

 
Saint­ François – basilique haute


Nous voici à présent dans la basilique supérieure, vaste nef unique, spacieuse et lumineuse, possédant également un transept et une abside polygonale. Le plafond en croisée d’ogives présente une alternance d’étoiles d’or sur fond bleu et de peintures. Les deux côtés supérieurs de la nef présentent un ensemble de 32 scènes de l’Ancien Testament (en commençant par la Création du monde et se terminant par Joseph pardonne à ses frères) et du Nouveau (depuis l’Annonciation). Véritable tour de force de Giotto, c’est la partie inférieure qui mérite un voyage à Assise ! 28 fresques au total, trois par baie, ainsi que deux sur le mur d’entrée. Le peintre a reconstitué les grands épisodes de la vie du Saint, usant de couleurs vives tout bonnement incroyables !! On ne peut que s’extasier devant les oeuvres du maître, d’autant que nous étions absolument seuls ce matin d’hiver, seuls avec Giotto.

basilique supérieure

basilique supérieure 

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1 - Ale miracle de la Croix : alors qu’il était en prière devant le crucifix de l’église Saint Damien, François entend une voix lui implorant de « réparer son église en ruine ». Il vend donc des marchandises de son père et fait restaurer l’édifice. B François renonce aux biens terrestres Cle songe d’Innocent III : le Pape voit en rêve un Saint tenant à bout de bras la basilique Saint Jean de Latran avec l’aspect que lui avait donné la restauration effectuée par Nicolas IV en 1290.

2 - Ala vision du chariot de feu : plusieurs frères de l’ordre réveillent d’autres membres endormis afin de leur montrer la curieuse apparition dans le ciel ; François, entouré d’une mandorle, passe dans le ciel, juché sur un char romain, véritable nouveau guide de la Chrétienté. B la vision des trônes : un des frères, compagnon de François, voit en songe cinq trônes, dont un immense au centre, destiné, lui dit l’ange, à François en prières, l' "humble homme ".


A hommage d’un simple homme : première des 28 scènes, même si elle fut probablement peinte en dernier. Un simple homme étend son manteau devant le gentilhomme François. Il a compris que le grand homme méritait cet honneur, tandis que les autres personnages sont incrédules ; la distance entre les principaux protagonistes est marquée par le temple de Minerve, à Assise.
B François offre son manteau : 2ème scène mais réalisée au tout début, d’où les différences de style et de couleurs entre les deux. François offre son manteau d’or à un simple citoyen, devant un paysage de deux collines qui s’opposent, avec une ville à gauche et un monastère à droite. François oriente donc déjà ses pensées vers un monde de pauvreté.
C- le songe du palais : François voit en songe le Christ lui montrant un palais rempli d’armes marquées du signe de la croix, l’exhortant à le suivre pour combattre aux côtés de l’Eglise.

hommage d’un simple homme


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1 - le sermon aux oiseaux
2 - Et nous voilà ressortis au niveau de la basilique supérieure, après avoir admiré tant de merveilles !


Des ruelles médiévales


La vieille ville d’Assise, d’époque médiévale, est toute en pierres apparentes. C’est un réel plaisir de se promener au hasard des ruelles.

   


Piazza del Comune

Coeur de la ville médiévale après avoir été forum romain, la petite piazza del Comune a conservé tout son charme au fil des siècles, dominée par la tour du Peuple, érigée au XIIIème siècle. Son horloge fut installée au XVème.


Toujours sur la place se dresse le temple romain de Minerve, du Ier siècle avant notre ère. On l’a attribué à Minerve, avec la découverte d’une statue de femme, mais ce serait sans doute à Hercule qu’il était dédié au départ. Des martyrs chrétiens étaient exposés sur les marches, entre les colonnes, à une époque où la nouvelle religion monothéiste prenait de plus en plus de place. C’est en 1539 que ce petit temple fut transformé en église, Santa Maria sopra Minerva, elle même remaniée plus tard pour répondre au style baroque, ce qui donne ce résultat pour le moins hideux (à droite). Seuls les six colonnes corinthiennes et le pronaos ont été gardés de l’époque romaine.

 
 


Cathédrale San Rufino


A l’est de la ville, à l’opposé de la basilique donc, un autre monument a joué un rôle primordial dans l’histoire de l’ordre franciscain : la cathédrale dédiée à Saint Rufin, évêque et martyr du IIIème siècle. C’est ici que François et Sainte Claire se firent baptiser en 1182 et 1193. Cette dernière fut convaincue de sa nouvelle vocation en entendant prêcher François dans l’édifice, au tout début du XIIIème siècle.
La façade, romane ombrienne, est typique des édifices de cette époque, avec son organisation en trois parties : – le niveau supérieur, relativement vide et triangulaire, possède un arc plein cintre probablement destiné à contenir une frise ou une mosaïque. – le niveau intermédiaire est divisé par deux pilastres, rejoignant l’arc du niveau supérieur. Chacune des baies ainsi formées possède une rosace, la plus grande et la plus fleurie étant au centre. Trois atlantes debout sur un animal la soutiennent (voir photo plus bas pour le détail). – le niveau inférieur est formé d’un grand nombre de carrés et de trois portails en pierre décorés de griffons à la base des latéraux. Dans la lunette de l’arc demi­-circulaire au­-dessus du portail principal (voir photo) se trouve un Christ en mandorle sur son trône, entre le Soleil et la Lune, entouré de la Vierge tenant l’enfant Jésus, et Saint Rufin. Il faut noter aussi la profusion du décor d’entrelacs floraux.

cathédrale San Rufino

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1 - tympan

2 - intérieur de la cathédrale
3 - détail d’un lion dévorant un infidèle… sympathique !
4 - Détail de la fine rosace centrale, soutenue par les atlantes.


Eglise Santa Chiara


L’église Santa Chiara, dédiée, donc, à Sainte Claire, remonte au XIIIème siècle. De l’extérieur, elle surprend par ses trois énormes arcs -boutants qui maintiennent l’édifice sur le côté gauche. La façade, alternance de pierres du pays blanches et roses, propose un arc plein cintre terminé par deux lions au repos.

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1 - Parvis de l’église.
2 - Vue sur le château médiéval qui domine la ville.
3 - arcs-boutants
4 - l'étroite nef gothique
5 - la crypte contenant les restes de la Sainte
6 - les fresques de l’abside remontent au XIIIème siècle et sont l’oeuvre de l’école de Giotto

La vue depuis le parvis de l’église donne en contrebas sur la plaine de Spoleto et les maisons qui dégringolent la colline.
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Italie - Assise, de Saint François à Giotto Italie - Assise, de Saint François à Giotto Reviewed by RENOULT on 03 février Rating: 5

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